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Je n’aurais pas imaginé la venue aussi rapide de Francesca Melandri à la librairie quand, en 2012, je découvrais son premier roman Eva dort. Il aura fallu mon enthousiasme de lecture récurrent à chacun de ses trois livres pour qu’un beau jour on m’amène cette proposition presque « sur un plateau ». Cela ne se refuse évidemment pas et, à la parution de Tous sauf moi, nous aurons l’occasion de parler avec elle de ce qu’elle a appelé la trilogie des pères. Francesca Melandri est une documentariste et scénariste pour la télévision italienne. Elle rentre en littérature avec un roman sur le Haut-Adige, région du nord du pays qui a appartenu à l’Autriche. En explorant une part sombre de l’Histoire pour écrire son premier roman, elle réalise qu’un seul livre ne suffira pas à fouiller dans tous les pans cachés que l’Italie recèle et qui pourraient bien expliquer sa situation actuelle. Avec Tous sauf moi, c’est à la colonisation de l’Éthiopie dans les années 30 qu’elle s’attaque, mettant en scène une femme d’aujourd’hui qui, découvrant à cinquante ans l’existence de son neveu noir, va partir en quête de l’histoire de son père avec la complicité de son demi-frère. Le perpétuel aller-retour entre hier et aujourd’hui ainsi que la persévérance de son personnage rendent le roman particulièrement vif et énergique. Mais c’est aussi parce que, chez Francesca Melandri, il y a une urgence à rouvrir des portes fermées scrupuleusement à clé et à redire ce que les Italiens ont eux-mêmes tenté d’oublier. En cela, sa démarche peut se calquer sur les pays d’Europe occidentale dans leur ensemble, ce qui, dans le contexte divisé que nous traversons tous, donne des pistes de réflexion. Aussi, elle entame une vaste tournée qui la mène de librairies en salons avec un esprit volontariste, poussée par un désir de transmission indéniable, où sont concernés ses découvertes, ses présupposés et toute l’énergie déployée dans ses recherches. En sept ans, elle sera allée par deux fois en Éthiopie à la rencontre de quelques témoins encore vivants. Ses remerciements à la fin du livre les gratifient de manière très émouvante.